Interview du Docteur Laurent Michaud

Cette année, l’AFAO a remis au Docteur Laurent Michaud, pédiatre gastro-entérologue au Centre de référence des affections congénitales et malformatives de l’œsophage,  une dotation de 5000  euros pour son projet d’étude du devenir des enfants atteints d’atrésie de l’œsophage à 6 ans.

A cette occasion Elisa Thévenet, journaliste, a réalisé pour l’AFAO, un interview de ce spécialiste :

Pourquoi avez-vous décidé de lancer ce projet d’étude ?

Actuellement, nous ne possédons pas de données fiables sur les enfants atteints d’atrésie de l’œsophage qui nous permettraient de connaître précisément l’évolution de la pathologie. Il existe bien quelques données rétrospectives, certains médecins ayant suivi leurs patients à l’âge adulte parce qu’ils avaient des problèmes de reflux, de dysphagie, etc. mais ce sont des études hétérogènes et non-exhaustives.

La première étape consistait donc à créer une base de données ?

En effet, grâce au registre, créé en 2008, qui répertorie tous les nouveaux cas d’atrésie de l’œsophage en France, nous possédons désormais des renseignements précieux sur les patients. Les enfants étant suivis régulièrement dans les différents centres, les informations remontent jusqu’à nous et nous donnent progressivement une cartographie de la pathologie aux différents âges.

Pouvez-vous nous expliquez plus précisément votre projet ?

Notre objectif est de suivre la cohorte d’enfants nés entre 2009 et 2011, soit environ 450 patients, pour voir ce qu’ils deviennent à 6 ans, (une consultation multidisciplinaire étant prévu à cet âge). Ont-ils toujours du reflux ? Combien ont été réopéré ? Comment vont-ils sur le plan respiratoire ? Quelle est leur qualité de vie ? Une fois toutes ces données rassemblées, nous les compareront à celles récoltées à la naissance pour faire une étude statistique et savoir quels sont les facteurs de risque de développer telle ou telle pathologie. Notre démarche s’inscrit dans une volonté de prévention.

Pourquoi est-il fondamental d’étudier ces données ?

Les chirurgiens sauvent les enfants grâce à des techniques de plus en plus précises et efficaces, mais une fois l’œsophage mis bout à bout, le problème n’est pas réglé pour autant. Il existe des malformations associées et des complications comme le reflux, la trachéomalacie, la dysphagie, qui nécessitent un suivi, d’où la question essentielle du meilleur suivi adapté à l’enfant. Or pour pouvoir orienter les soins, il faut disposer d’un maximum de données. Mais les choses ont bien évolué au cours des dix dernières années, on tend de plus en plus vers un véritable suivi et une prise en charge homogène.

Dans combien de temps espérez-vous obtenir les premiers résultats ?

Le projet est déjà bien avancé. Dès l’année prochaine, nous enverrons un document à remplir par les médecins pour tous les enfants inscrits dans le registre entre 2009 et 2011, avec des questions très précises sur l’état de santé du patient et sur son parcours de santé. On s’intéresse essentiellement aux données médicales, aux complications rencontrées et aux traitements dispensés. Une fois toutes les données rassemblées, nous les analyserons pour identifier des grandes évolutions. Donc d’ici trois-quatre ans, nous aurons déjà une photographie à 6 ans des patients. On sait où l’enfant est né, on pourra même étudier l’évolution de l’incidence, voir si il y a plus d’incidence dans certaines zones géographiques par exemple. Les désherbants ont parfois été incriminés, on pourrait imaginer de mettre à l’épreuve cette hypothèse, en observant s’il existe des différences entre le nombre de cas en ville et à la campagne.

Elisa Thévenet

©Vidéo-digest

Merci à Elisa Thévenet pour sa mobilisation, son soutien et son travail de journaliste au profit de l’AFAO !

 

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